Charbon de bois
Charbon "de forge"

L’histoire du charbon de bois remonte à un très lointain passé, par le procédé des meules forestières.

L’Art de fabriquer le Charbon de Bois
est intimement lié à l’histoire de la métallurgie, et partout l’exploitation des meules s’est développée parallèlement aux mines : la métallurgie du fer n’a été possible qu’avec le charbon de bois.
Une des préoccupations majeure des Maîtres de Forges était l’exploitation rationnelle de la forêt, car les établissements métallurgiques s’installaient dans les massifs forestiers où, en général, il leur était attribué d’importantes concessions d’exploitation du bois.
Le charbon de bois, excellent réducteur, a joué un rôle essentiel dans le traitement des minerais métalliques. La métallurgie du fer repose essentiellement sur la réduction, au rouge, de l’oxyde de fer par l’oxyde de carbone.

Dans la Méthode Catalane on chauffe le minerai avec du charbon de bois dans un creuset carré en maçonnerie. On commence par garnir le creuset de charbon de bois en ignition, sur lequel on charge - côte à côte – du minerai et du charbon ; Ce dernier, en quantité double, est disposé dans le voisinage de la tuyère d’entée d’air ; Sous l’action du vif courant d’air de la soufflerie, le charbon brûle ; l’anhydride carbonique, formé par la combinaison de l’oxygène et du carbone, se transforme en oxyde de carbone sur l’excès de charbon des couches voisines portées au rouge ; l’oxyde de carbone traverse ensuite la masse du minerai, le réduisant partiellement à l’état de fer métallique, tandis qu’il se transforme lui-même à nouveau en anhydride carbonique…
Méthode expéditive, de faible rendement, nécessite un minerai riche, et du bois en abondance…qui a eu néanmoins le mérite de permettre la naissance d’une métallurgie du fer.

(Extrait : )

"... LES PROCÉDÉS DE CARBONISATION

Procédé des meules.

   Le seul mode de carbonisation dont l’usage soit général en France est le procédé des meules.
  Les bois sont empilés, par lits superposés, sur une aire dressée avec soin et appelée faulde, ne façon à former un tas, dit meule ou fourneau, ayant la forme d'une calotte sphérique surélevée. la meule est recouverte d'une enveloppe de feuilles sèches et de mousse, sur laquelle on dispose, pour empêcher l’accès de l’air, une couverture formée de terre mélangée de frasil ou frasin, poussier provenant des fourneaux précédemment carbonisés. Cet habillage de la meule reçoit parfois le nom de bougeage. On met le feu par le haut, au moyen d'une cheminée ménagée au centre, ou, plus rarement, par des canaux réservés dans la masse du bois contre le sol. Le charbonnier dirige l’opération en ouvrant successivement des évents dans les différents points de la couverture.

Les derniers charbonniers

Le volume des meules est très variable; dans certains pays de montagnes, il ne comprend que 2 ou 3 stères; ailleurs, il s'élève jusqu'a 300. On peut, sous ce rapport, distinguer trois types principaux : les petites meules, contenant en moyenne 8 à 15 stères; les meules de capacité moyenne, contenant de 35 à 60 stères; les grandes meules, dont le volume dépasse 100 stères.
Les petites meules sont presque exclusivement employées dans les forêts du bassin de Paris : elles ont même, quelquefois, reçu le nom de fourneaux de Paris. Elles donnent un charbon bien cuit et parfaitement approprié aux usages domestiques; aussi leur emploi tend à se généraliser depuis que l’industrie métallurgique consomme une moins grande quantité de charbon de bois.
  Les meules de capacité moyenne sont surtout en usage dans les départements de l’Est. On s'en sert principalement pour la fabrication du charbon destiné aux forges. Souvent, d'ailleurs, dans une même localité, on emploie l’un ou l’autre des deux procédés, suivant la destination que doit recevoir le charbon. Les grandes meules sont peu usitées. Les Landes, le Doubs et le Jura sont les seules régions où l’on en fasse emploi, encore sont-elles d’introduction toute récente dans le Jura. On n’y comprend pas au-delà de 300 stères.

Rendement :
D'après des relevés faits par les agents forestiers sur tous les points du territoire, le procédé des meules donne, en moyenne :
 
 
Par stère régulièrement empilé  de bois de chêne ............  82 kg de charbon

de bois de hêtre.............  76 ------------

d'essences mélangées, 
 les bois durs dominant........
73 ------------

de bois blancs ..............  55  -----------

de pin et de mélèze........... 58 ------------

de sapin et d’épicéa.........  53-------------

En admettant le chiffre de 425 kilogrammes comme poids du stère de bois durs et celui de 325 kilogrammes comme poids du stère de bois blancs ou de résineux, on voit que cette production répond à un rendement moyen  de 17 à 18 %.
Dans des conditions favorables et surtout quand la carbonisation est faite par des ouvriers habiles, le rendement est de beaucoup supérieur : ainsi, la Compagnie des forges d'Audincourt, qui consomme et fait confectionner chaque année 300,000 hectolitres de charbon de bois, obtient 89 kilogrammes par stère d'essences dures carbonisé en forêt.
Les meules de capacité moyenne donnent en général un rendement supérieur à celui des petites meules, mais la quantité du charbon obtenu étant différente,
il est difficile de comparer les deux procédés.
 

Fosses des Basses-Pyrénées

Dans les Basses-Pyrenées, on fait parfois usage de petits fourneaux ayant la forme des meules ordinaires, mais qui, au lieu d’être établis à la surface du sol, le sont dans une fosse circulaire creusée à une profondeur de 0m,50 à 0m,60. Ces fourneaux comprennent 3 à 4 stères.

Fours pour la carbonisation du pin d’Alep dans le département de Vaucluse.

Dans le département de Vaucluse, on emploie, pour le pin d’Alep, un procédé particulier. La carbonisation se fait sous terre, dans des fours de forme cylindrique, présentant 0m,50 de diamètre sur 2 mètres de hauteur. En établissant ces fours, qu'on creuse simplement dans le sol, on laisse d'ailleurs à la partie supérieure une épaisse couche de terre destinée à former fermeture et dans laquelle on pratique seulement une ouverture de 0m,80 de diamètre. Les bois sont disposés dans la fosse par assises verticales; le charbonnier y met le feu par en haut et il dirige la carbonisation en bouchant plus ou moins l’ouverture, de façon à diminuer ou à activer la combustion.

  Braisette.

Dans le Nord, on fabrique avec les bourrées un menu charbon appelé braisette, qui sert à alimenter les chaufferettes dont se servent les fumeurs du pays. La braisette se fait, tantôt en enflammant simplement les ramilles empilées et en recouvrant la braise de gazon et de feuilles humides dès que la combustion est terminée, tantôt en disposant les bourrées en tas réguliers et en les recouvrant de terre avant d'y mettre le feu, ce qui permet d'obtenir un rendement bien plus considérable. Le commerce de cette marchandise a une certaine importance; on exporte de la braisette dans l'Artois, en Flandre et en Belgique. La seule forêt de Mormal (Nord) en produit annuellement 65000 kilogrammes.
 

Perfectionnements :

Le procédé des meules ayant l'inconvénient de donner un rendement très variable suivant les circonstances extérieures et en moyenne assez faible, certains constructeurs ont cherché a établir des appareils permettant d'opérer la carbonisation en forêt dans de meilleures conditions. On connaît, du nom de leurs inventeurs, les appareils Moreau et Dromart.
Dès le XIXeme siècle, on a amélioré le procédé des meules par l’invention d’appareils ou fours mobiles à charbonner : en 1840, l’appareil Vartel composé de panneaux métalliques assemblés, repris sous diverses formes vers la fin du XIXe siècle, avec par exemple l’appareil Moreau (1874), qui était un four polygone démontable, comportant sur le pourtour des buses et des cheminées. Le but recherché étant « d’automatiser » la conduite du feu, à cet effet des évents à la base du four se fermant d’eux-mêmes. Divers autres appareils ou fours mobiles : Delhommeau, Malboy, Laurent, Barbier-Aubé, Trihan, Frey, Magnein, etc…

Les derniers charbonniers
 

Appareil Moreau.
L'appareil Moreau se compose d'un vase en tôle ayant la forme d’un prisme droit octogonal; sa hauteur est de 2m,50 et chacun des huit côtés a 1 mètre de largeur. Des cheminées et des buses disposées sur le pourtour et au sommet de ce récipient servent au dégagement des gaz et des liquides produits par la carbonisation. Des prises d’air, ouvertes dans le bas, permettent d'allumer facilement le bois qu'on dispose dans l’intérieur. Au moyen d’une disposition fort ingénieuse, toutes ces ouvertures se ferment d'elles-mêmes, automatiquement, quand la combustion devient trop active.
  L'appareil est construit de façon à pouvoir se démonter et se transporter facilement et il permet de carboniser, en trente heures, environ 10 stères de bois.

Au dire de l'inventeur, le charbon produit serait excellent et le rendement en poids, s'élèverait à 23 et 24 %.

L'appareil Dromart
Il se compose d'une cage en forme de dôme, composé de plaques de fortes tôle montées sur un bâti en fonte. La partie supérieure se termine par une cheminée munie d'un couvercle mobile ; la partie inférieure est ouverte et la cage se pose simplement sur une aire préparée comme pour une meule ordinaire. Dans cette aire, on établit d'ailleurs préalablement, en maçonnerie de brique et d'argile, un foyer qui, sans communiquer avec l'intérieur de la cage, y fait pénètrer la chaleur par une série de conduits convenablement disposés à la surface du sol et dont quelques uns sont recouverts de plaques de fonte.
La cage s'emplit de bois au moyen d'une porte ménagée sur le côté ; on allume le foyer et la carbonisation ne tarde pas à se produire.
Lorsque des vapeurs de couleurs rouge commencent à se dégager, on éteint le feu, on ferme la cheminée et on laisse refroidir le tout.
Le four de M. Dromart, tel que cet ingénieur le construit aujourd'hui, contient 20 stères et à 4 m de diamètre à la base.
Le poids et les dimensions des diverses pièces entrant dans la construction, ont été calculés de façon que le transport en soit facile.
Il a été employé pendant plusieurs années dans les Landes et il résulte de diverses expériences, notamment de celle faite en 1870 par M. Roux, garde général des forêts, que le rendement en charbon est au moins de 25 % du poids du bois employé.
Cet appareil, pas plus que celui de Mr. Moreau, ne s'est encore répandu dans la pratique.
Nous doutons même que les fours de ce genre arrivent jamais à être d'un usage général
(NDLC : L'avenir donnera tort à l'inspecteur Larzillière, car en 1925 l'usage des fourneaux était fort répandu), car ils entrainent une mise de fonds et des frais qui compensent en grande partie la plus value réalisée sur la production du charbon. Ils pourraient toutefois trouver un emploi fort utile dans certaines circonstance, notamment pour la carbonisation des brindilles et des menus arbrisseaux que les marchands de bois et les propriétaires des forêts ne savent trop souvent comment utiliser.
Ainsi, la Compagnie des Forges d'Audincourt, dont nous avons déjà parlé, atelle, après divers essais, continué à suivre le procédé des meules pour la carbonisation des bois de grosseur ordinaire tout en adoptant un four d'une forme rappelant celle de l'appareil Moreau, pour confectionner avec les bourrées un charbon dont elle tire bon parti. Dans les contrées, comme les Landes et la région des Maures et de l'Esterel, ou se trouve des quantités immenses de bruyères et de mort-bois, qu'on est parfois obligé de détruire à grands frais, des appareils de ce genre pourraient rendre des services incontestables...." (....)

( Extrait de : M. Larzillière, Notice sur le débit des bois de feu, leur mode de vente et les procédés de carbonisation usités en France. Exposition Universelle de 1878 - Ministère de l'Agriculture et du Commerce - Administration des Forêts. Paris, Imprimerie Nationale, 1878)
 

D'un point de vue économique, le charbon de bois et le charbonnage ont longtemps constitué une ressource importante pour les populations voisines des forêts et des établissements métallurgiques. De même pour les muletiers chargés du transport du minerai et du charbon de bois, tout comme les bateliers de l’Isère étaient mis à contribution pour le transport du minerai et du métal produit par les usines alpines par cette vois d’eau.
 
 
 
 
Graves problèmes de déforestation lié à la surexploitation des forêts au Moyen Age.

Dès la premiére moitié du XIVe siècle, les approvisionnements en bois et en charbon étaient devenus très difficiles : les martinets s'étaient multipliés sur tous les ruisseaux des montagnes  de Chartreuse et le bois et le charbon, très demandés par les tenanciers d'artifices, se vendaient deux fois plus cher que par le passé. C'est alors que le Dauphin Humbert II, le 25 juillet 1339, ordonna de détruire tous les martinets dans un rayon de trois lieues autour de Grenoble et dans le délai de trois mois

(Thérèse SCLAFERT, Le Haut Dauphiné au Moyen Age. 1926)

Un métier vivant : www.charbon-aggouni.fr

Un alsacien charbonnier 

Les charbonniers de la vallée du Bocq (Belgique)

L’Art de Charbonner

Urbain des bois, l’apprenti charbonnier;  Philippe Hanus, PNR du Vercors

Bibliographie :

- M. Larzillière, (Sous-Inspecteur des Forêts). Notice sur le débit des bois de feu, leur mode de vente et les procédés de carbonisation usités en France. Exposition Universelle de 1878 - Ministère de l'Agriculture et du Commerce - Administration des Forêts. Paris, Imprimerie Nationale, 1878.
- Lepoivre, (A) & Septembre, (G). Le charbon de bois. Editions Chiron, Paris, 1941, 239 p..
- Musset, (D.). Charbonniers, le métier du diable ?  In : Migrance, marge et métiers, Le Monde Alpin et Rhodanien, N° 1-3-2000, pp. 133-150 
  - De mémoire de charbonniers,  Alpes de lumière, N° 119, Mane, 1996

Merci à  Christian Aquilina pour les photos et à Phototexto pour son  autorisation
 
 
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